Ce sera mon 106e billet et je me suis enfin décidé à écrire le billet que je ne voulais pas écrire. Par pudeur.
C’est long, la dépression.
Et tout seul, c’est encore plus long.
Je ne suis supposément pas seul, mais ce n’est pas comme ça que je me sens…
Je me sens affreusement seul.
Je sors de chez mon psy où on a travaillé la « désensibilisation ». C’est-à-dire que j’ai répété quatre fois la même histoire, celle où je me rends chez mon ex en taxi, la peur au ventre, alors qu’elle vient de me dire au téléphone qu’elle va mettre fin à ses jours.
Une course interminable d’une trentaine de minutes où le chauffeur rigole parce que je lui ai demandé de « peser sur le champignon » parce que c’est une question de vie ou de mort.
Et je pleure et je ne pense qu’à une chose : je me vois annoncer la triste nouvelle à mes enfants.
Ça s’appelle un trauma et ça t’habite continuellement. Ta tête et ton corps font rejouer en boucle le film des événements. C’est extrêmement souffrant. Chaque fois, c’est comme si tu y étais, encore une fois.
Dans mon cas, le scénario s’est répété trois semaines plus tard. Pas eu le temps même de digérer le premier choc que c’était reparti pour une deuxième ride…
Comme une chanson qu’on grave sur un CD, ces événements se sont gravés dans ma tête et dans mon corps.
Ça eu ensuite plusieurs conséquences dans ma vie, presque aussi douloureuses.
Moi qui était le premier à vouloir aller au combat, moi qui trouvait toujours des solutions aux problèmes, je suis comme un enfant qui doit réapprendre à marcher.
Il m’arrive de me sentir coupable de ne pas être capable, huit mois plus tard, de retourner au travail.
Il m’arrive de me sentir coupable de faire vivre ce cauchemar à ma fille, qui en a bavé elle aussi depuis 2 ans.
Comme quoi, je suis moi aussi, à l’occasion, un cordonnier mal chaussé.
Le plus difficile, c’est que je me mobilise pour m’en sortir, mais la douleur, elle, ne s’en va pas comme ça, d’un simple claquement de doigts.
Je me sens un peu comme un coureur de marathon qui voit constamment la ligne d’arrivée s’éloigner.
Y a des matins, je n’ai carrément pas envie d’enfiler mes chaussures de courses pour aller courir mon marathon…
Je suis un humain et ma résilience connaît des ratés à l’occasion.
Il y a des journées où ça va mieux, sauf que je me lève le lendemain avec une douleur dans la poitrine.
Dans mes moments de découragement, je me demande si tous mes efforts vont finir par porter fruits.
J’imagine que oui.
C’est ça la dépression, la fucking dépression.
Bob Gainey a déjà joué des séries éliminatoires après s’être disloqué les deux épaules.
Moi, ça fait huit mois que je « joue » avec un cerveau magané.
J’essaie juste de ne pas scorer trop souvent dans mon propre but. Si je marque un but contre l’adversaire à l’occasion, c’est une sacrée victoire.
J’essaie de construire là-dessus, les petites victoires.
Un fucking petit pas à la fois.
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