J’ai publié hier une photo de moi en jaquette d’hôpital.
Je gage que plusieurs personnes ont été dérangées par cette photo.
Moi pas.
On voit de tout sur les réseaux sociaux. Des photos de repas. Des photos de famille. Des selfies, beaucoup de selfies. Très souvent, ce sont des photographies de moments heureux.
Je n’ai rien contre. Mais il y a d’autres moments importants dans la vie. Il y a aussi des moments difficiles.
C’était un moment difficile pour moi lorsque j’ai pris cette photo.
J’avais pris la décision, en décembre dernier, d’aller chercher de l’aide à l’hôpital.
Et une fois admis à l’hôpital, on te demande de porter une jaquette d’hôpital.
Je n’étais pas vêtu telle une carte de mode, je le reconnais. Ce sont les mêmes maudites jaquettes depuis toujours.
Et les pantoufles ? Ces magnifiques pantoufles bleues qu’on te remet avec ta jaquette…
On te dit que tu peux garder tes bas… You bet que je vais garder mes bas.
On appelle ça des pantoufles, mais ce sont plutôt des couvre-bas, justement. Des couvre-bas sans bas, ça ne fait pas très chic.
O.K avec des bas, ce n’est guère mieux, mais entre deux maux, on choisit le moindre.
Tant que ce ne sont pas des bas blancs 😉
Tu files un mauvais coton, un très mauvais coton et on t’habille avec les dernières créations – préhistoriques – du système hospitalier.
Je crois que je vais suggérer aux autorités la cravate d’hôpital ou le noeud papillon d’hôpital. Déjà, ça ferait sourire un peu. Ce serait déjà ça, un sourire, pour faire un pied de nez à la souffrance.
Pourquoi revenir sur ma jaquette d’hôpital ?
Parce que je suis tombé sur l’histoire de Mathieu Arsenault, caméraman et réalisateur. Il souffre aussi de troubles bipolaires.
> Briser les tabous en montrant les vrais visages de la maladie
Mathieu Arsenault a créé une série documentaire Urgence santé mentale, dans laquelle il veut montrer les vrais visages de la maladie.
« Je voulais qu’on voie de vrais visages, car je suis un peu tanné des publicités montrant des visages flous sur des panneaux. Je trouvais qu’il fallait lever ce tabou de ne jamais montrer les gens en crise. Je trouve qu’on a le droit d’exister, d’être différent, de se soigner et de vivre. Pour cela, ça prend un visage à l’écran afin que les gens comprennent et ressentent ce qu’on vit. Je voulais aussi montrer que le système n’a pas que du mauvais, qu’il y a beaucoup de gens dévoués et compétents qui se démènent pour aider en santé mentale, qui sont vraiment des héros du quotidien. »
Que voilà une bonne idée !
La maladie mentale est déjà complexe et difficile à comprendre.
Pour briser le tabou, l’une des clefs, c’est effectivement de montrer les visages de la santé mentale. Et ces visages, ils ne sont pas toujours beaux et souriants, comme dans les publicités de Bell cause pour la cause.
On n’hésite pas à nous montrer des enfants souffrant de malnutrition dans des pays en développement. Pourquoi pas un bipolaire en pleine crise ? Un schizophrène qui entend des voix ? Un dépressif en pleine crise de larmes ?
Et pourquoi pas un journaliste en dépression et en jaquette qui est allé chercher de l’aide à l’hôpital…
Tout ça dérange, évidemment.
Et les gens n’aiment pas être dérangés en cette ère de dictature du bonheur préformaté et manufacturé. Ça fait tache d’huile sur leur petit bonheur.
Un enfant en Afrique, ça va. Il est loin et puis, c’est tellement pauvre là-bas, se dit-on.
Un voisin en dépression ? Euh…. non.
Il a tout ce qu’il faut pour être heureux, de quoi se plaint-il ?
Il ne se plaint pas justement. Il souffre, tout simplement.
C’est un homo sapiens, comme tout le monde et il aimerait être reconnu comme tel.
Un humain parfaitement imparfait.
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