Ça allait pas pire ce matin.
Pas pire, ça veut dire beaucoup pour moi.
Je me suis réveillé un peu angoissé, mais pas trop.
Un peu le moton en allant faire prendre la marche matinale de mon chien.
Un peu angoissé et juste des motons, c’est comme des vacances pour moi.
J’ai même reçu un appel de mon ami et ancienne douce moitié syndicale, ce bon vieux Charles Côté.
Bref, la journée était bien commencée, dans les circonstances.
J’avais une course à faire avant de partir pour le CHUM. Ça impliquait de prendre le « formidable » chemin de Chambly.
Quant tout va bien dans ta vie, le chemin de Chambly, c’est quand même une sorte d’épreuve. Il y a quelques artères comme ça, qu’on préfère éviter. Le chemin de Chambly en fait partie.
Je suis allé acheter la pièce qui manquait pour une réparation. Et sur le chemin du retour, l’angoisse s’est emparée de moi. La douleur à la poitrine s’est intensifiée. Je me suis mis à pleurer comme un bébé en conduisant ma Toyota Echo sur l’affreux chemin de Chambly.
Niaiseux comme ça.
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Je confirme que l’algorithme de Facebook est une machine parfaitement huilée.
Je vois passer plein de nouvelles qui traitent de la santé mentale.
Certains diront que je suis maso, que je ne me donne pas les meilleures chances de guérir.
Je répondrai que ça fait partie du plan.
Dès le début, j’ai décidé de plonger dans cette fucking dépression.
J’ai été assez lucide pour reconnaître qu’à 51 ans, je portais quelques cicatrices qui étaient encore vives. Et que les mammouths que j’ai affrontés avaient laissé des traces de leur passage.
Je pouvais jouer à l’autruche. Revenir au jeu, comme on dit, le plus vite possible.
Et courir le risque de me blesser à nouveau.
Facebook, donc.
Je suis tombé sur cette nouvelle :
Depression isn’t like a broken bone
En gros, on ne guérit jamais totalement d’une dépression.
On change, on s’adapte.
Comme l’écrit la journaliste, la dépression, ce n’est pas comme un os brisé, qu’on recolle.
Ça ne marche pas comme ça.
Ça prend du temps à accepter ça. Parce que notre premier réflexe, c’est de vouloir guérir le plus vite possible. D’abord, parce qu’on ne veut plus souffrir. Ensuite, parce qu’on veut revenir à ce qu’on était avant la dépression.
C’est l’une des raisons pour laquelle les antidépresseurs sont si populaires.
Je ne critique pas les antidépresseurs. J’en prends. Mais ce n’est qu’un outil contre la dépression. En principe, c’est censé t’aider à souffrir un peu moins pour faire le reste du travail qu’il reste à faire.
C’est comme quand Brendan Gallagher rentre au vestiaire après avoir reçu un slap shot de Shea Weber sur le main. On lui donne quelque chose pour geler sa douleur afin qu’il puisse retourner sur la glace.
Je commence moi-même à accepter cette idée, qu’on ne guérit pas d’une dépression si l’on n’accepte pas un peu de changer. Faut dire que je suis têtu parfois…
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Des bons mots valent parfois leur pesant d’or.
Quant tu es en arrêt de travail, pour une dépression en plus, les occasions de se sentir valorisé sont proches du néant. Tu es un peu coupé du reste du monde.
Mais j’ai été chanceux aujourd’hui.
Charles, d’abord, qui m’a téléphoné en me disant : « Veux-tu que je fasse ta journée ? »
Trop absorbé par la lecture de l’un de mes billets, il raté la station de métro où il devait descendre.
Je me suis excusé de lui avoir fait raté sa station de métro et je l’ai remercié pour les mots gentils.
Au CHUM, ce sont deux formidables infirmières qui s’occupent de moi. Selon leur horaire, ce n’est pas nécessairement la même qui m’accueille d’une journée à l’autre.
Hier, j’ai eu droit aux compliments d’une des infirmières. Aujourd’hui, j’ai eu droit aux compliments de l’autre, qui dit avoir beaucoup aimé mon billet : Quand la stimulation machin côtoie la détresse humaine.
J’ai rougi un peu, je pense, pendant qu’elle installait la bobine de cuivre sur mon crâne.
Bref, ça m’a fait oublier un peu le tabarnak de chemin de Chambly 😉
p.s. : Encore merci à mon ami Jerry Prindle, qui prend de trop bonnes photos. Cette route est évidemment tout le contraire du tristement célèbre chemin de Chambly.
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