Avant de vous parler de moi et de mes petits pas, laissez moi vous présenter ma dernière pièce.
Elle est inspirée d’une histoire vraie qui m’est arrivée alors que j’étais journaliste à Rimouski, en 1996. Je travaillais pour feu le quotidien Le Fleuve. J’avais 29 ans.
Je ne me rappelle plus trop comment la rencontre s’était produite, mais toujours est-il que j’avais croisé le curé de la paroisse de Sainte-Anne-de-Pointe-au-Père. Pour ceux qui ne le savent pas, c’est le deuxième lieu de pèlerinage en importance au Québec après Sainte-Anne-de-Beaupré, dans la région de Québec. Si vous l’ignoriez, consolez-vous, moi-même je ne le savais pas avant d’écrire là-dessus. Enfin, j’ai plutôt écrit sur le curé de la paroisse que sur le paroisse et son pèlerinage, qui ne m’intéressait guère.
Je m’intéressais et je m’intéresse encore à l’humain. À homo sapiens.
Je ne sais trop pourquoi, j’avais trouvé l’homme intéressant et mon instinct me disait que ce prêtre avait des choses à dire. Des choses intéressantes. J’ai proposé à mon patron de faire une entrevue avec le curé. Il a accepté, un brin sceptique.
Je n’ai pas été déçu. L’entrevue a donné lieu à tout un scandale. Même l’archevêché de Québec s’en était mêlé, chicanant son curé au passage.
Le curé avait été d’une franchise totale. Et parfois brutale pour son Église.
Il a ensuite été forcé de dire en plein messe qu’il avait été mal cité par le journaliste.
Le lendemain, il m’appelait pour s’excuser. Je ne l’avais pas mal cité, au contraire, m’avait-il dit.
J’entends encore toute sa tristesse au téléphone. C’était un moment surréaliste, mais aussi profondément humain. Plus humain que les institutions elle-même, même l’Église.
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Sinon, je continue mes petits pas. Des fucking petits pas, j’insiste.
Une chose est sûre, il y aura quelque chose de transformé en moi après cette dépression.
Je pense que c’est une bonne nouvelle.
Je dis je pense parce qu’en ce moment, je ne suis sûr de rien. Je sais que je vais m’en sortir et je commence même à voir que les petits pas donnent des résultats.
Sauf que les fois où ça fait mal, ben ça fait encore fucking mal. Dans ce temps-là, je n’ai pas trop la tête à penser à mes petits pas. Je sais juste que j’ai mal. Pis je pense pas mal juste à ça quand ça fait mal.
Entre les deux, je suis capable de voir que les petits pas font avancer pour vrai. Aucune idée de la distance parcourue, cependant. Et aucune idée aussi de la distance qu’il reste à parcourir. J’aime mieux ne pas trop y penser.
Je pense qu’une fois installé dans mon nouveau chez-moi, les choses vont lentement s’accélérer. Difficile de reconstruire, se reconstruire, dans un endroit où tu n’es pas bien. Petit pas ou pas, y a certaines vérités comme ça qu’il faut reconnaître.
p.s. : non, je n’ai pas l’intention de devenir prêtre… C’est une photo de moi prise alors que je servais de cobaye pour un projet artistique de ma fille alors qu’elle était au secondaire. Un prêtre-clown. Il était peut-être triste, qui sait…
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