J’ai dit que je n’écrirais plus sur ma dépression.
Tout été dit.
Voici ce que j’avais à dire sur le sujet :
https://epchampagne.com/2018/11/09/tourner-la-page/
Mais ça ne veut pas dire que je n’ai pas d’autres choses à dire.
Je viens de tomber sur cette lettre publiée dans le journal Le Soleil.
Il n’y a rien de bien nouveau là-dedans. Et c’est ça qui est choquant.
Ça fait des années qu’on dit ça que la psychiatrie est le parent pauvre de la médecine.
Je vais radoter là, mais je sens que c’est important.
D’ici 2020, l’Organisation mondiale de la santé prévoit que la dépression sera la deuxième cause d’invalidité dans le monde.
Je dis ça de même. C’est un léger détail, j’imagine.
Pis y a pas que la dépression. Encore là, je ne vais pas vous les énumérer, vous les connaissez déjà.
Juste rappeler que les troubles reliés à l’anxiété explosent carrément. Surtout chez les jeunes filles
Des sociologues tous meilleurs que moi, plus intelligents et plus savants ont probablement d’excellentes théories pour expliquer tout cela.
Je vous donne la mienne, ma théorie à cinq cennes :
D’abord, on vit dans une société d’hypocrites.
Oui, vous avez bien lu.
Je l’ai écrit assez souvent, je vais m’assumer.
On vit dans la société de la dictature du bonheur.
Donc, tout ce qui entre en contradiction avec ça, ben on ne veut pas vraiment en entendre parler.
Bien sûr, on sait que ça existe tout ça, la dépression, les troubles d’anxiété, la souffrance. Mais on ne veut pas trop se faire écoeurer avec ça.
Tsé, on a la pelouse à tondre, le cours de la piano de la petite, la game de hockey du plus grand, les feuilles à ramasser pis le souper avec les beaux-parents à préparer.
Alors, t’as cinq minutes pour me raconter tes malheurs, après ça, j’ai vraiment une journée full occupée. Pis j’ai eu une semaine de fou au bureau…
Je corrige le tir, on ne vit pas dans la société de la dictature du bonheur, mais dans la société de la dictature de l’apparence du bonheur.
Parce que souvent, les gens qui n’ont pas le temps d’écouter vos malheurs ou vos souffrances sont aussi malheureux, parfois, c’est pire.
Tsé, le miroir qui est supposé dire que c’est toi la plus belle (ou le plus beau), ben des fois, il te montre autre chose. Pis ça ne te fait plaisir. Et ça te dérange.
‘C’est à ce moment que ton chum te crie que vous allez être en retard pour le cours de piano de la petite. Oups, désolé, on se reparle la semaine prochaine…
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Mon autre explication à cinq cennes, c’est qu’il y a moins d’argent à faire en psychiatrie.
Bien sûr, il y a eu toutes sortes de molécules mises au point par les compagnies pharmaceutiques contre la dépression, l’anxiété et plein d’autres affaires
Le hic, c’est que ça prend plus que des pilules. Je le savais déjà, mais c’est un autre leçon de ma dépression. Tsé les petits pas, les fucking petits pas. Le temps, une heure à la fois, un jour à la fois.
Ben, ça ne peut pas être breveté, le temps, les petits pas. Pas d’argent à faire avec ça.
Quand c’est moins payant, c’est moins tentant d’investir là-dedans.
Tsé, des affaires qui prennent du temps. Tu avances et tu recules. Une journée tu va pas pire, mais le lendemain, c’est la fin du monde. C’est long pis ça coûte cher. Pis le résultat est même pas garanti.
C’est fatiguant ça…
Pas grave, c’est homo sapiens qui ramasse la note…
Photo : tsé des petits pas, ça fait des millions d’annés qu’on fait ça, homo sapiens, y a pas une crisse de cenne à faire avec ça. Mais c’est ça pareil qui a fait avancer l’espèce humaine, je dis ça de même…
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